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Pazea Sovni

On ne choisit pas le paysage de sa jeunesse. Dépendant·e des adultes, on grandit là où iels vivent. Ma famille habitait entre Namur et Liège, de part et d'autre de la Meuse.

Dans la voiture, dans le bus, dans le train, je regardais le paysage se fondre dans la vitesse. Ce défilement incessant d’images m’hypnotisait. Je me droguais à la vue de ce travelling sans fin, celui de mon propre road-movie. J’y projetais mes fantasmes d’une autre vie, qui aurait eu pour cadre ces innombrables décors éphémères. Condamné à disparaitre aussitôt, chaque instantané m’offrait un autre monde possible. J’étais toujours déçue d’arriver, de sortir de l’univers de la fenêtre.

Depuis cinq ans maintenant, je retourne régulièrement dans cette région. J’ai brisé la vitre de la voiture, du bus, du train, pour me jeter toute entière dans le paysage. A pied, je peux mettre mon vieux film sur pause autant de fois que je le veux et assouvir ma curiosité. Je pars à la recherche d'un monde disparu, celui des souvenirs de ma jeunesse. Je traque ses traces, je déniche ses reliques. Dans ces lieux qui m'inspiraient tant alors, des personnages apparaissent, des histoires se dessinent. Le quotidien gris d'une région marquée par les vestiges de l'industrialisation me semble source d'une inquiétante étrangeté: il s'y passe autre chose. Influencée par le cinéma belge et sa poésie noire, oscillant entre fiction burlesque et documentaire social, je dresse le portrait subjectif d’un territoire, le mien.

Pazea: mot wallon signifiant chemin ; sentier à travers bois et champs

Sovni: mot wallon signifiant souvenir ; objet qui rappelle un lieu ou une personne

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